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Articles sur Montherlant (hors presse)

160. Henry de Riancey pionnier de l’automobile et oncle d’Henry de Montherlant, par Michel G. Renou

Michel G. Renou, né le 24 avril 1946 à Paris, est un historien de l’automobile française.

Henry de Riancey, frère de la mère de Montherlant née Marguerite de Riancey – celui-là même que l’écrivain caricatura sous le nom de Léon de Coantré dans Les Célibataires, sans profession, et qui, dans le roman, entretenait méticuleusement le jardin de la maison mais fuyait se réfugier dans la remise lorsqu’un visiteur se présentait – est passé négativement à la postérité sous la plume de son neveu. Dans le roman c’est un raté qui, après son service militaire, avait monté avec l’aide financière de la famille, une société afin d’exploiter un brevet d’agrandisseur photographique de son invention “très en avance” qui se termina deux ans plus tard par une faillite[1]. Cependant la liberté du romancier envers la réalité est totale, il peut s’en inspirer et la travestir comme bon lui semble et, s’il maîtrise bien son art, le lecteur n’y voit que du feu ; ainsi les connaisseurs de Montherlant ont vite assimilé son oncle Henry de Riancey au personnage de Léon de Coantré.

Mais qu’en était-il vraiment ?

Selon des souvenirs de la famille de Courcy, on disait qu’Henry de Riancey avait été un bel officier, doué pour tout ; la physique, la mécanique l’intéressaient, construisant lui-même une automobile très perfectionnée pour l’époque, s’enfermant pour faire des expériences et, en tout, d’une surprenante habileté manuelle[2]. Montherlant aurait-il simplement remplacé les voitures à pétrole (comme on disait alors) par les agrandisseurs photographiques afin de brouiller les pistes ?

«Construisant lui-même une automobile
très perfectionnée pour l’époque
»

Cette phrase ne pouvait laisser indifférent l’historien de l’automobile que je suis et piqua vivement ma curiosité. À cette période évoquée, c’est vraiment le temps des pionniers de l’automobile naissante qu’on appelait aussi des voitures sans chevaux et beaucoup de jeunes passionnés par la mécanique – tel Louis Renault, autodidacte, 21 ans à l’époque – se lançaient dans l’aventure pour ce mode révolutionnaire de locomotion considéré par les personnes plus âgées, habituées à la locomotion hippomobile, comme un divertissement luxueux réservé aux classes aisées et comme un nouveau sport pour les plus aventureux qui «pratiquaient l’automobilisme».

Beaucoup d’apprentis constructeurs, après une ou deux, voire une petite dizaine de voitures à pétrole construites n’ont pu survivre et sont rapidement tombés dans l’oubli. Tel fut le cas de l’oncle de Montherlant.

Je me mis à rechercher dans les revues automobiles des années 1890/1910 et vous livre ce que j’y ai découvert[3]. Quel étonnement de découvrir dans les revues spécialisées de cette époque des articles louangeurs sur les automobiles De Riancey[4]. Eh oui ! l’oncle de Montherlant, Henry de Riancey, avait bel et bien été un pionnier de l’automobile naissante avec, de plus, certaines idées innovantes qu’il avait dûment brevetées.

Principales revues dans lesquelles les automobiles De Riancey sont présentées :

  • La Locomotion automobile, créée en 1891
  • L’Avenir du Cycle et de l’Automobile, créée en 1895
  • La France automobile, créée en 1896
  • La Vie au Grand air, créée en 1898
  • L’Auto Vélo, créée en 1900.

Louis Baudry de Saunier contribua à vulgariser la locomotion nouvelle
par ses très nombreux articles et publications.
Appréciant les travaux d’Henry de Riancey,
il n’hésita pas à souscrire des actions de sa société.

1. La Société des Automobiles De Riancey.

Par acte sous seing privé du 18 mars 1899, Henry de Riancey, demeurant à Paris, 18 rue Duphot[5], crée une société anonyme qui prend la dénomination de «Société des Automobiles De Riancey» au capital de 350 000 F. (réparti en 350 actions de 100 F.) dont l’objet est «l’Exploitation des brevets pris au nom de M. de Riancey seul, soit au nom de MM. de Riancey et Gévin (M. Gévin apportant ses brevets uniquement sur le moteur)»[6].

Parmi les brevets apportés le plus novateur est celui déposé le 31 décembre 1895 d’un «système à avant-train moteur», suivent d’autres brevets concernant la carburation, la transmission, le freinage et le moteur lui-même fonctionnant à pétrole et à gaz carburé.

«M. de Riancey apporte à la Société :

  • Le droit au bail à l’atelier et au bureau situés à Paris 3 place Daumesnil.
  • Le droit à la force motrice de 5 chevaux à cette même adresse.
  • Deux moteurs De Dion-Bouton et trois moteurs De Riancey-Gévin.
  • Deux avant-trains complets.
  • Une voiture prototype.
  • Dix voitures en cours de fabrication.

M. de Riancey apporte en outre à la Société, personnellement, son concours entier et sans réserve, lui abandonnant le fruit de son travail et ses études et recherches.

M. de Riancey est tenu de rembourser à M. le comte Emmanuel de Riancey une somme de 6 000 F pour les dépenses de construction de la voiture prototype et 2 700 F pour avance faite aux ouvriers des dix voitures en cours de fabrication.»

Pour la création de sa société l’oncle de Montherlant fit appel aux différentes branches de la famille. Parmi les principaux actionnaires, outre naturellement lui-même, nous trouvons le comte Emmanuel de Riancey (son père), le marquis de Grosourdy de Saint-Pierre, le marquis de Saint Bière, le comte de Dreux Brézé, le comte et la comtesse d’Espinay de Saint Luc, le vicomte Jean de Courcy, Guy de Courcy, etc. Mentionnons également Baudry de Saunier l’un des tout premiers journalistes spécialisés dans la locomotion nouvelle qu’il contribua à vulgariser par ses très nombreux articles et publications, tels par exemple L’automobile théorique et pratique publié en 1897 ou Les recettes du chauffeur [7] publié en 1901. Mais dans la liste des actionnaires de la famille, le nom de Montherlant brille par son absence. Le père de l’écrivain, très vieille France, monarchiste, réactionnaire, était un homme de cheval et abhorrait les nouveautés préfigurant le XXe siècle. Chez les Montherlant à Neuilly pas d’électricité, pas de téléphone, pas de phonographe et, bien sûr, pas d’automobile, tant par crainte de la dépense que de la nouveauté. Quoi qu’il en soit la «lubie pour les puantes et pétaradantes voitures sans chevaux»[8] devait être considérée comme une aventure dangereuse voire sans avenir.

2. Les réalisations d’Henry de Riancey, constructeur d’automobiles.

L’avant-train moteur : le chaînon entre la voiture à cheval et la voiture à moteur.

Cette première réalisation d’Henry de Riancey en 1895, avant la création de sa société Automobiles De Riancey, est un avant-train moteur qui prenait la place du cheval et motorisait ainsi une voiture hippomobile.

L’idée très novatrice était de réaliser une transition entre le cheval et le moteur avant de passer à une vraie voiture automobile. C’est-à-dire garder la même voiture hippomobile, calèche ou cabriolet, y enlever les deux brancards, et y fixer un train-avant moteur de son invention. Nous avons relevé cette phrase dans la présentation de cet avant-train moteur :

«Supprimons le trotteur et coupons les brancards ; le cheval mécanique vaut l’autre et au repos ne mange pas».

Très intéressées, plusieurs revues de vulgarisation automobiles de l’époque ne s’y trompèrent pas qui firent paraître cette «astucieuse réalisation De Riancey» en première page de leur magazine.



Article de La Locomotion automobile

Les historiens de l’automobile estiment que cette calèche motorisée par l’avant-train moteur De Riancey peut être considérée comme «la toute première traction avant française».

3. La voiture légère 5 CV De Riancey

Une médaille de bronze a été attribuée à la voiture DE RIANCEY (fig. 17).

Le constructeur s’est ingénié à chercher des dispositifs appropriés pour mettre les passagers à l’abri des trépidations désagréables, caractéristique des voitures à moteur à essence. Ainsi cette voiture est pourvue d’un moteur à explosion du type dit équilibré.

Lorsqu’en 1899, Henry de Riancey créa sa société, les éditions de L'Annuaire statistique de la Ville de Paris établissaient à 288 le nombre d’automobiles dans la capitale sur un nombre total en France de 1 672. On le voit l’avenir offrait de très belles perspectives d’extension et Henry de Riancey se lança dans la construction d’une véritable automobile cette fois qu’il voulait légère et nerveuse. Ce sera une voiture 5 CV d’un peu plus de 400 kg sur un châssis métallique avec moteur à l’avant et transmission par arbre et chaîne aux roues arrière. Disposition classique bien que bientôt la chaîne disparaîtra. En revanche la colonne de direction munie d’un volant était inclinée vers le chauffeur, et non plantée verticalement comme sur beaucoup d’autres à l’époque ce qui était une nouveauté. Ce châssis pouvait être habillé, au choix du propriétaire, en version biplace avec coffre à l’arrière ou en version quatre places munie de deux banquettes dos à dos ou encore avec un strapontin à l’arrière.

Lors de la constitution en 1899, nous avons vu qu’Henry de Riancey avait apporté à la société «une voiture prototype et un projet de dix voitures en cours de fabrication», soit une petite première série à construire et à vendre. Pour l’assemblage un atelier avait été loué à Levallois-Perret, à l’ouest de Paris, proche banlieue ouvrière à l’époque dans laquelle se trouvaient déjà plusieurs artisans constructeurs.

L’originalité de cette voiture était qu’elle disposait de son propre moteur bicylindre, «système De Riancey-Gévin» et non d’un moteur acheté tout monté à un autre constructeur, notamment le fameux moteur De Dion-Bouton qui motorisa plusieurs marques débutantes, notamment celle de MM. Renault frères à Billancourt.

Nous ne savons pas grand-chose sur M. Paul-Louis Gévin qui était certainement le concepteur de ce moteur. Était-il le «copain de régiment» d’Henry de Riancey comme l’était un certain sergent Levier, dont le père était contremaître dans un atelier de mécanique générale, l’associé de Léon de Coantré dans Les Célibataires pour l’exploitation des agrandisseurs photographiques ? C’est possible,

Montherlant s’inspirant très souvent de faits réels dans ses romans.

L’original moteur bicylindre De Riancey-Gévin :

Deux pistons se déplacent horizontalement et agissent chacun sur le même arbre moteur. La bielle de chaque piston est reliée à une de ses extrémités à un balancier mobile autour de son milieu dans un plan vertical, l’autre extrémité est reliée par une bielle à un coude de l’arbre moteur. La régulation automatique se fait sur l’échappement. Le changement de vitesse est obtenu par un train baladeur.

4. Concours d’automobilisme

La nouvelle 5 CV De Riancey fut présentée à l’Exposition universelle de Paris en 1900 qui se tenait concurremment aux Jeux olympiques d’été de 1900 à Paris également.

La pratique de l’automobile étant considérée à l’époque comme un divertissement luxueux réservé aux classes aisées, et comme un sport pour les plus aventureux, nous l’avons dit.[9]

Ainsi cette nouvelle pratique faisait donc partie des sports de démonstration lors de l'Exposition universelle jumelée avec les Jeux olympiques se tenant ensemble à Paris en l’été 1900. Quatorze épreuves sont prévues au programme.

Les vainqueurs ne gagnaient pas de médailles olympiques mais divers prix. Les premiers remportaient des objets d'art, les suivants des médailles de vermeil, d’argent et de bronze.

Vincennes, août 1900.
Concours d’automobilisme dans le cadre de l’exposition universelle de Paris
jumelée aux jeux olympiques de Paris.

«Le comte Henry de Riancey - ingénieur-constructeur –
remporte une médaille d’argent et une médaille de bronze

Les concours d'automobilisme se divisaient en deux parties : les épreuves d'endurance et la course de vitesse. Les épreuves d'endurance permettaient de tester les véhicules de différentes catégories au niveau du bon fonctionnement du moteur, de la consommation du combustible (pétrole, électricité, vapeur ou autre), de la facilité de la conduite et du confort. Les départs étaient donnés sur la piste qui fait le tour du lac Daumesnil dans le bois de Vincennes et les véhicules devaient ensuite parcourir la ville et la banlieue de Paris sur une distance de quelque 100 km, jugée suffisamment importante pour prouver leur fiabilité. En outre la vitesse ne devait pas dépasser 20 km/h dans les lieux habités et 30 km/h (soit un petit peu plus qu’un cheval au galop) sur les routes, conformément aux termes du décret du 10 mars 1899 (le code de la route n’existait pas encore).

Eh bien ! dans ses épreuves, M. de Riancey et sa voiture se comportèrent honorablement. Nous lisons dans les résultats qu’il termina 4ème de la catégorie voiture à deux places derrière M. Peugeot premier, M. Delahaye deuxième et M. Rochet (Rochet-Schneider) troisième. Henry de Riancey terminait les épreuves avec une vitesse moyenne de 13,2 km/h sur l’itinéraire en zone urbaine et de 21,13 km/h sur route.

Au concours de consommation, la voiture De Riancey reçue une médaille d’argent, derrière la voiture Peugeot, médaille d’or.

Après cette brillante démonstration Henry de Riancey présenta «le tout dernier modèle 1901» à l’exposition automobile de janvier 1901 qui se tenait pour la première fois au Grand Palais et qui est considérée comme le premier vrai Salon de l’Auto parisien.



En 1901, le constructeur De Riancey dévoile dans le cadre du Salon de l’automobile de Paris la type B, une nouvelle voiture à deux places commercialisée au prix de 4.400 francs. Elle est toujours équipée du moteur de Riancey-Gevin de 4 HP 3/4 (5 CV) permettant une vitesse de 38 km/h en charge.

On relève également pour cette année 1901 une participation à une épreuve se déroulant le 28 avril 1901 aux alentours de Melun sur un parcours de 77 km, où la De Riancey fut classée 13ème du classement de sa catégorie.

Et puis, après cette ultime démonstration, plus rien !

Plus aucune mention dans la presse de l’époque, spécialisée ou non. Henry de Riancey disparut totalement du monde de l’industrie, de l’automobile et des affaires.

En réalité, on apprenait qu’après trois années d’existence, et après avoir participé à des concours d’automobilismes la société des Automobiles De Riancey était en liquidation.

Reste un témoignage tangible de cette aventure du début de l’automobile : une voiture 5 CV De Riancey survivante – la seule sur la petite dizaine de fabriquées –, témoin, maintenant plus que centenaire, du génie de l’oncle oublié de Montherlant.

Voiture De Riancey, modèle 1901.
Unique survivante connue à ce jour, conservée précieusement au musée automobile
du Château de Grandson (Suisse) dont elle est la doyenne des voitures du musée.

5. L’automobile : «un plaisir de brute et un dérangement !»

Reste la question posée au début de cet article : le comte Henry de Riancey ressemblait-il vraiment à la caricature du pauvre type qu’était le comte Léon de Coantré décrit dans Les Célibataires «…perdu parce qu’il manquait de relations»[10] ? Pour ma part je ne le pense pas. Henry de Riancey croyait à l’avenir, croyait aux nouveautés telles l’automobile, l’aéroplane, l’électricité, etc., qui, à l’aube du XXe siècle allaient révolutionner la façon de vivre de ses contemporains.

Évoluant dans le milieu de l’automobile en tant que constructeur – coopté par le cercle mondain et très fermé de L’Automobile club de France[11] – il avait acquis très certainement, en plus du respect de ses pairs, des relations qui lui permettaient de se reconvertir, tant dans le milieu de l’automobile que dans les milieux, journalistiques ou autres, liés à sa passion de l’automobile. Qu’en fut-il en réalité ? Nous n’en savons rien, mais il me semble impensable qu’il se retirât totalement du monde tel Léon de Coantré ne cherchant plus qu’à entretenir le jardin de la maisonnée familiale ? Ou bien alors seulement durant les dernières années de sa vie, affaiblit par la maladie ?[12] Ignorant tout de son passé de pionnier de l’automobile, les lecteurs et, plus grave, les biographes de Montherlant ont, à mon avis, fait preuve de légèreté en l’assimilant trop vite et entièrement au personnage du raté caricaturé par son neveu dans Les Célibataires. Puisse cet article réhabiliter sa mémoire.

Autre question : pourquoi ce silence total de Montherlant sur la destiné de cet oncle – qu’il appelait familièrement «oncle Noute» – génial inventeur, très adroit de ses mains, qui se lança dans la grande aventure de l’automobile naissante ?

Je pense avoir trouvé la réponse dans La Rose de sable dans ce passage où Montherlant décrit les sentiments de Guiscart, auquel très probablement il s’identifiait :

«Il méprisait profondément l’automobile symbole pour lui de la vulgarité, de la prétention et de l’excitation de l’époque. Quelqu’un qui désirait une automobile était classé dans son esprit ; et c’était déjà mauvais genre que d’avoir la moindre notion du fonctionnement de ces mécaniques. À la vérité, il avait bien essayé d’apprendre ce fonctionnement, mais s’en était montré incapable […].

Guiscart y ajoutait cette idée, que le goût de l’automobile témoigne du vide de l’esprit et que pour un homme qui a quelque chose dans la tête, l’automobile comme la TSF, le phonographe, etc., n’est qu’un dérangement : ce sont des plaisirs de brute. Un dérangement, voilà le mot !» [13]

Déjà dans Les Bestiaires, on y découvre cette pique envers l’engin nouveau : «La duchesse et sa fille […] seraient probablement en retard, parce que femmes, et parce qu’en auto.»[14]

Pauvre oncle qui avait un neveu méprisant tenant ses réalisations automobiles pour un plaisir de brute et un dérangement !

Il est fort probable que lorsqu’il fallut quitter la maison de Neuilly, Henry de Riancey s’occupa de classer et de mettre soigneusement dans des cartons et des malles non seulement les souvenirs de la famille[15], mais également ses propres archives concernant ses études et réalisations et celles de feu sa Société des Automobiles De Riancey. Archives restées des années au garde-meubles[16] puis très certainement abandonnées par Montherlant lorsqu’il se fixa définitivement à Paris, rue de Bourgogne, après ses années de pérégrination autour de la Méditerranée. Ainsi, avec la disparition de ses archives, mourut une deuxième fois le comte Henry de Riancey (1870-1925), inventeur, bricoleur, mécanicien, visionnaire, pionnier de l’automobile française.

Appendice

Tous les écrivains témoins des débuts de l’automobile n’étaient pas comme Montherlant hostiles à cette invention nouvelle. Bien au contraire certains s’enthousiasmaient et le faisaient savoir. Ils en parlaient comme d’un progrès permettant plus de liberté et plus vitesse en offrant surtout des «perspectives de voyage jusqu’ici inédits».

Citons-en quatre parmi d’autres :

  • René Boylesve qui relate dans la presse son premier long voyage en automobile à l’été 1894 avec deux amis et un chauffeur-mécanicien à bord d’une Panhard-et-Levassor à la moyenne de 17 km/h, article intitulé «Azurine ou le nouveau voyage».
  • Maurice Maeterlinck qui publia en 1901 dans Le Figaro «Sensations d’automobiliste», article dans lequel il évoque ses sensations nouvelles procurées tant par la vitesse que par une nouvelle relation avec l’espace/temps, mais aussi l’angoisse de la panne sur une route déserte.
  • Octave Mirbeau qui, lui, consacre carrément un ouvrage entier à son automobile, une CGV-Charron de 30 CV. Paru en 1907, le titre «La 628-E8» est tout simplement son immatriculation parisienne. C’est un vif éloge de l’automobile, de la vitesse qu’elle procure et de la liberté nouvelle qu’elle offre de faire de grands voyages sur les routes de France malgré les conditions hasardeuses de l’époque.
  • Marcel Proust. Ne passons pas sous silence ce grand écrivain – dont peu savent qu’il était ouvert au progrès, étant par exemple l’un des premiers abonnés au téléphone parisien –, qui publia en 1907 dans Le Figaro ses «Impressions de route en automobile».

Michel G. Renou
Historien de l’automobile française.

Note : Pour en savoir plus sur la famille de Riancey, on se reportera à l’article suivant sur ce site :
Les Camusat de Riancey, ascendants maternels de Montherlant, par Henri de Meeûs.

Notes

[1] Pléiade, Romans I, p. 755
[2] Souvenirs inédits de la vicomtesse Jean de Courcy (1875-1953)
[3] Sources : archives privées et BNF/Gallica.
[4] Marque De Riancey (et non Riancey).
[5] Bel immeuble dans le quartier haussmannien de La Madeleine.
[6] Archives de la Chambre des Notaires (ex-département de la Seine).
[7] Chauffeur car il fallait faire chauffer longuement le moteur à l’arrêt avant de démarrer.
[8] Scripsit Léon Bloy, très autophobe, in L’Assiette au beurre.
[9] Tel en vacances le jeune Montherlant qui écrivait à son condisciple Faure-Biguet : «Je suis quelques jours sur la Loire où nous faisons de l’auto, du cheval et d’autres choses d’un ordre moins physique» (Les Enfances de Montherlant, p. 91, Ed. Lefebvre,)
[10] Pléiade, Roman T. II, p. 1217.
[11] Fondé en 1895 par le comte Albert de Dion, constructeur des automobiles De Dion-Bouton.
[12] Il meurt à 55 ans au Touquet-Paris-Plage. «Tout était pour lui – par sa maladie – complication et effort.» (lettre de Montherlant à sa tante Marie de Courcy à l’annonce de sa mort.)
[13] Pléiade, Romans II, page 149.
[14] Pléiade, Romans I, p. 403.
[15] Tel Léon de Coantré en une scène décrite dans Les Célibataires.
[16] Pléiade, Essais, Appareillage, p.291.