Articles sur Montherlant (hors presse)

17. Louis-Ferdinand Céline (1894-1961) et Montherlant (1895-1972)

Cet article est extrait du passionnant Dictionnaire Céline (page 594, Edition Plon, 2004, 880 pages), écrit par Philippe Alméras, un des meilleurs spécialistes de Céline.

“Je n’ai pas lu Montherlant. Il faut être au moins médecin pour m’apprendre quelque chose.”
(Céline à son amie Eveline Pollet, 19 mai 1937).

Céline prend Montherlant à partie dans ses lettres de l’Occupation et du Danemark. Dans le premier cas, il s’agit de lui faire confesser ce qu’il pense de “la question”, par la suite il trouve que l’auteur du Solstice de juin s’en est sorti à trop bon compte.

Il l’appelle Henri le Torero et Henri Torero dans une lettre à Marie Canavaggia signée Abélard. Plus tard ce sera “Buste à pattes”.

En 1950, Pierre Monnier a l’idée de solliciter une lettre de soutien à Céline qui est sur le point d’être jugé. Montherlant lui répond qu’il n’a pas lu plus de trois pages de Céline, “ces trois pages m’ayant porté à penser que c’était là “de la littérature”, aussi artificielle et aussi désuète que celle de Paul Alexis ou de Paul Lombard, écrivain au style “artisse” de la fin du XIXe siècle, et qui ne sera plus lue dans cinquante ans”, que ces auteurs-là ne sont plus lus aujourd’hui, qu’il n’a aucune connaissance du dossier Céline, “et personne de sérieux ne portera un jugement sur un procès de collaboration (ni sur un procès quelconque), sans avoir eu connaissance du dossier”. Qu’ayant été lui-même accusé de collaboration, son nom, “dans un pareil objet, serait rien ou pis que rien, ou plutôt ferait sourire. Et je m’étonne un peu que vous ne l’ayez pas senti. (…)”

En 1960, reconduisant à la grille de la route des Gardes Claude Sarraute, la fille de Nathalie, Céline lui demande :

“Vous avez vu Montherlant pour son élection (à l’Académie) ? Ca va bien pour lui, il doit être content. Lui c’est Chateaubriand qui le gêne. Le drapé antique. Il n’y arrive pas, ça l’embête.” (Le Monde, 1er juin 1960).

Son contemporain à un an près, Montherlant survivra onze ans à Céline. Encore meurt-il de sa propre main.

Philippe Alméras